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« Au lycée Arago de Perpignan »

  • lemenstrueldeperpi
  • 10 févr.
  • 4 min de lecture

Photo piquée. Le maître d'école avec Coluche.
Photo piquée. Le maître d'école avec Coluche.

 

En se dirigeant dans la salle, elle avait l’impression d’avoir l’allure d’une ourse. Les cheveux aplatis sur son crâne et sa frange de côté dévoilaient une légère ressemblance à Mister Bean*. Juliette, lycéenne en terminale au lycée Arago de Perpignan, vivait depuis toujours chez une famille d’accueil à Tresserre*. À son plus grand désespoir, elle était tombée amoureuse du fils aîné d’Anne et de Gilbert, le couple de concierges du lycée.

 

Elle avait passé la nuit à se rouler sous la couette, comme on le faisait pour paner un poisson congelé avant d’être frit dans une huile dégueulasse. En silence, elle priait tous les dieux pour réussir son baccalauréat et prendre seule son envol sans devoir rien à personne. Depuis toujours, elle avait l’impression que son âme ne s’était pas bien emboîtée dans son corps. Elle avait le pressentiment de marcher avec des souliers trop petits. Elle voulait aller de l’avant en déchirant l’image de l’abandon.       

 

Ce matin, c'était l’épreuve de philosophie. Le professeur, Tonio agrégé en lettres, savait fleurir à la perfection la verve de Cicéron*. Il avait le don de parfumer les logorrhées des plus grands philosophes de tous les temps. Il détenait l’arme de transmettre son savoir aux élèves, quand bien même la plupart de la classe étaient dyspraxies*.


En fin de compte, des abrutis, morveux, boutonneux et branleurs dont les parents se convainquent qu’ils sont des hauts potentiels.

 

Assise et prête pour deux heures, Juliette découvre le sujet de Philo.


« Sommes-nous une sorte de metaverse où tout n’est qu’illusion ou répétition ? »

 

En rapprochant ses voluptueuses cuisses, l’une contre l’autre, elle commence en douceur son esquisse par une masturbation neuronale :

 

 —Si la vie était une sorte de metaverse j’irais trouver face à face celle qui m’a abandonnée. Je lui souhaiterais que ses entrailles se transforment en cimetière. Je l’enverrai au fond de l’abysse du Tartare* sous la surveillance de Campé*.

Sauf que le virtuel est dépourvu de pouvoir pour le réel. À part que Mark Zuckerberg* se magne pour créer des casques dotés d'interférer avec la destinée du réel.

Quoique les émotions du virtuel pourraient bien conditionner le ressenti du réel, comme dans le film de Sylvester Stallone* Demollition Man* : faire l’amour virtuellement, n’est-ce pas le même résultat quand je rêve des baisers de Sébastien ?

La métaverse est peut-être d'avoir l’imagination suffisante pour vivre nos rêves sans les casques ? Il y a bien une chanson de Jean-Jacques Goldman* qui résume la métaverse des pauvres : la vie par procuration*.

Neal Stephenson* avait décrit la metaverse comme une échappatoire dans une réalité, c'est-à-dire, être conscient de vivre deux réalités en même temps. Ce qui m’oblige à parler aussi d’Albert Einstein* et des mondes, plutôt des vies parallèles. Puis défendre sa dernière formule, prouvant qu’il est plausible d’être ici et ailleurs au même moment.

 J’ai l’impression de décrire mon voisin schizophrène…

Tout reste relatif…

 

Le temps s'écoule sans que Juliette en prenne conscience.


— Si ce n’est qu’illusion, alors nous nous trouvons en plein film Matrix*.

Deux réalités connectées avec des pouvoirs et des incidences liés par défaut.

Impossibilité de vêtir deux rôles. Le rêve n’est plus, car la réalité s’estompe dans l’unité. Disons que je suis dans le ventre de ma mère et que l’abandon n’est qu’une néfaste probabilité illusoire qui s’évaporera pendant que l’autre connasse mettra bas.

L’illusion reste l’échappatoire de ressentir les émotions platoniques en secret.

Après, l’illusion reste un leurre parce qu’il n’embellit pas la réalité.

Tiens !

Je pourrai parler des érotomanes*. Elles vivent avec un amour inconditionnel qui ne peut s’ajuster à la réalité. L’illusion efface les érotomanes* de la vie réelle comme les traits au crayon charbon noir d’un dessin qui n'a pas sa place nulle part. 

J'ai la vague impression que je vais faire un hors-sujet.

On dirait plutôt un mémoire en psychiatrie…  

 

Il vous reste une heure !

Se pavanant la surveillante du haut de son perchoir.


 Putain de bonsoir ! Je suis en retard ! Je n’ai pas encore commencé…

— Si la vie n’était que répétition ?

Je ne vais pas encore décrire un film dans lequel les scènes se répètent!

En revanche, j’aimerais prouver qu’avec la possibilité et plausibilité de répétition, le futur n’existe pas puisque nous vivons perpétuellement notre destinée sans aucun moyen de changer le cours des événements.

La répétition ne peut laisser place à l’existence du déjà-vu, car le souvenir n’a pas sa place dans un présent figé.

Vivre une vie répétitive, c'est comme l’IA : ne savoir utiliser que des 0 et 1 pour obtenir divers résultats sans aucun but précis.

La répétition n’a que pour but de rendre inerte un mouvement en pleine vitesse lumière.

 

je n'ai plus de temps!

Je vais me planter !

Je suis obligée de bâcler la répétition.

Dommage…


J’aurais bien aimé pouvoir continuer cette épreuve à l’oral, mais tout n’est qu’illusion et la vie métavers ne compte pas. Du moins pas ici.

Dois-je me contenter d’échouer une deuxième fois mon année ?

Alors la vie n'est qu'une réelle répétition.

 

Dédié à M. Bonmasseur.

 

 
 
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